Groupe Biodiversités de RISOMES – Journée plantes bio-indicatrices – 21 avril 2018
Alors que le printemps pointait le bout de son nez et que la nature s’épanouit de nouveau, le groupe biodiversité s’est réuni le 21 avril pour un relevé des plantes bio-indicatrices à Malain. L’occasion de découvrir celles qu’on appelle « mauvaises herbes », « adventice », « plantes compagnes » sous un autre œil et de comprendre un peu mieux ce qui se passe dans nos sols, jardins ou champs1.
Atlas botaniques, Encyclopédie (pour ne pas dire « Bible ») de Gérard Ducerf, et même smartphone (et si ! les appli s’y mettent) à la main : l’équipe a arpenté le jardin de la MILPA avec Hélène le matin et un champ de blé de Cyril l’après-midi pour partir à la recherche de ces « plantes folles » qui permettent de mieux comprendre le sol.
La méthode mise au point par Gérard Ducerf, ancien agriculteur, botaniste spécialisé dans le diagnostic des sols, nous a guidé dans cet exercice : un contrepied à l’agriculture productiviste qui fait de ces plantes des concurrentes des cultures et à notre obsession de la « propreté » qui consisterait à ne pas voir une herbe dépasser (sur nos trottoirs et autres lieux publics, dans nos jardins…). Gérard Durcerf nous rappelle que le sol, qui rassemble 90 % 2des êtres vivants de la planète, est habité par une multitude de graines « en dormance » qui ne se réveilleront qu’une fois les facteurs favorisant sa germination réunis. Chaque plante s’épanouit dans un milieu donné : selon la géologie, le climat, la structure de la couche arable, la vie bactérienne, l’environnement végétal… La présence d’une plante indique donc beaucoup sur le sol qui l’a vu lever.
Or les activités et pratiques humaines (jardinage et agriculture mais aussi le passage de véhicule…) impactent le sol qui « enregistre » ces contraintes. Ainsi, la présence de chiendent des champs est révélatrice d’un sol destructuré, le trèfle nain d’érosion ou le plantain lancéolé d’équilibre.
Voilà pour la théorie, passons maintenant à la pratique ! Le diagnostic se déroule en 3 étapes :
1 ) Relevé des plantes présentes. Couteau ou petite truelle de jardin à la main, des petits groupes se répartissaient le terrain à la recherche de toutes les plantes présentes sur le sol. Une fois les cagettes pleines de ces herbes qui nous semblent souvent banales, il est temps de les répertorier. Pas une mince affaire puisqu’il faut identifier précisément la plante (plusieurs variétés d’une même famille peuvent révéler des caractéristiques différentes). Heureusement, le groupe regorge de compétences et d’expériences et chacun y va de son commentaire pour tenter de retrouver le bon nom (en français et latin s’il vous plait !) : les joies du collectif.
2) Evaluer le taux de recouvrement. Cyril n’aura cessé de nous le répéter : une plante seule n’est pas indicatrice : elle devient significative à partir d’une certaine abondance ! L’idée est donc d’évaluer le « coefficient de recouvrement » à partir de … l’ombre portée au sol par les espèces identifiées. En cercle au milieu du champs, nous voilà en train d’étudier le taux de recouvrement des espèces. Finalement on se rend compte que seules quelques plantes parmi celles identifiées sont réellement significatives (mais notre culture botanique est désormais bien enrichie !).
3) Analyses les caractéristiques de la parcelle. A partir de ce fameux taux de recouvrement et des tableaux de Gérard Ducerf plus quelques calculs magiques qu’on ne manquera pas de faire partager si besoin… nous pouvons proposer une analyse des parcelles et condition de sol. Concernant le sol du champ de blé observé l’après-midi, il serait a priori encore riche en base (calcium ou calcaire actif). On noterait un léger compactage probablement dû au piétinement par des animaux (ou des tracteurs ?), conduisant à un léger engorgement du sol en eau (une prairie humide). Il serait légèrement riche en matière organique d’origine végétale et relativement riche en matière organique d’origine animale et/ou en nitrates (bouse de vaches).
Si on y met autant de conditionnel c’est que, comme on peut s’en douter, on ne peut garantir l’objectivité et la rigueur scientifique de cette étude pour de nombreuses raisons : la saison et date d’observation (certaines plantes n’étant pas en fleur et donc difficiles à identifier), le « délit de faciès » (c’est pas moi qui le dis c’est Gérard !) de certaines plantes jugées « mauvaises », les diverses significations de certaines plantes, le manque de représentativité sur l’ensemble de la parcelle (qui fait plus d’un hectare)…
Bref, l’idée n’était pas véritablement de réaliser une analyse scientifique du sol des parcelles mais aussi d’apprendre ensemble, de partager et mutualiser des connaissances, de prendre du recul sur ces plantes souvent mal considérées, de réfléchir à nos pratiques et … de partager d’agréables moments.
Références :
1 Eugénio Populin, « Les mauvaises herbes sont elles vraiment mauvaises ? Blog Mediapart, 5 décembre 2017 [ en ligne : https://blogs.mediapart.fr/edition/vert-tige/article/051217/les-mauvaises-herbes-sont-elles-vraiment-mauvaises]
2 Georges OXLEY, « Pourquoi j’ai mis la fleur au fusil », journal NAture & Progrès Avril 2017 : http://www.sossoil.com/category/bioindicator-plants/
Pour en savoir plus :
- Quelques exemples ici : http://www.chapelle-berard.com/fr/plantes-bio-indicatrices/
- La vidéo d’une intervention de Gérard Ducerd là : https://www.youtube.com/watch?v=knkH6lzgNwU
- Et plus encore : http://abiodoc.docressources.fr/index.php?lvl=categ_see&id=9163&get_last_query=1&sort=2
- Assister à une formation (Promonature, BioBourgogne…)