Dimanche 26 novembre, à la suite de l’assemblée générale du GFA citoyen Champs Libres, nous recevions Jocelyne Porcher pour une conférence-débat sur le thème de l’élevage. Jocelyne Porcher est sociologue à l’INRA, spécialiste de la relation de travail Homme-animal. Elle a notamment écrit « Vivre avec les animaux, une utopie pour le XXIème siècle » (La Découverte, 2011).

La salle fut bien remplie, environ 120 personnes sont venues s’informer et échanger sur cette question complexe de nos rapports aux animaux. De nombreux agriculteurs étaient présents dans la salle et les échanges furent très riches et constructifs. Le GFA Champs Libres et RISOMES ont à coeur à créer les conditions pour que chacun d’entre nous puisse se ré-approprier les enjeux agricoles dans une démarche d’éducation populaire. 

Dans les débats sur la place de l’animal dans nos sociétés, entre course en avant d’une agriculture industrielle et promotion du véganisme, nous avions posé la question suivante  « A quoi tenons-nous ? « . Jocelyne Porcher a répondu très clairement : elle tient à la distinction entre l’élevage et la production animale. La première relève d’une relation de travail que nous construisons avec les animaux domestiques depuis des siècles, la deuxième est l’aboutissement d’un projet de rationalisation de l’élevage (notamment par la zootechnie) qui vise à transformer l’animal en machine à profit.

Jocelyne a une conception du travail particulière, comme vivre ensemble dans le cadre d’une relation sociale et affective. Pour l’internante, nous ne connaissons pas encore toutes les richesses de cette relation, et il nous manque une théorie de l’élevage. L’enjeu est politique car il engage la survie de l’élevage en tant que pratique paysanne permettant de co-construire avec les animaux un vivre ensemble ; et il engage plus largement l’existence de tous les animaux domestiques (de travail, de service, de compagnie, de ferme). Car pour Jocelyne Porcher, ce que partagent les promoteurs du véganisme et ceux de la viande in vitro, c’est bien la disparition de l’animal domestique. Selon elle, il faut lutter contre ces deux fausses bonnes idées qui se nourrissent l’une et l’autre et partagent en commun une non-prise en compte des dynamiques sociales et politiques. Car la violence réelle et inacceptable affligée aux animaux est aussi la violence d’un système capitaliste qui touche les humains dans leur corps. Pour l’intervenante, il ne pourra y avoir d’avenir pour l’élevage paysan – ce point de rencontre entre le monde humain et le monde animal respectueux de l’un comme de l’autre, et de l’environnement – sans une sortie du système capitaliste. Ce que proposent les promoteurs de la viande in vitro est au contraire d’aller plus en avant dans les délires techno-scientifiques dont les conséquences sont de séparer les mondes plutôt que de créer des communs.

Merci à la librairie « La fleur qui pouse à l’intérieur » pour la sélection de livres ; merci à JIB’ pour l’animation musicale ; merci à la mairie de Mâlain pour le prêt de la salle. 

Pour aller plus loin : 

http://jocelyneporcher.fr

Un article de Jocelyne Porcher dans la revue Nature & Progrès : « La guerre à l’élevage est déclarée : qui veut la peau des animaux domestiques ?