Le 5 novembre 2021, le ministre a décidé de faire passer la France en niveau de risque élevé de grippe aviaire H5N1.

Qu’est ce qui a déclenché l’élévation du risque ? 3 évènements déclencheurs :

1/ Au Pays Bas, 2 foyers : 35 000 pondeuses et 105 000 poulets de chair ;

Au Danemark : 1 foyer de 27000 dindes

En Italie : 6 foyers de plus de 125 000 dindes

En Pologne : 1 foyer de 80 000 dindes

(Euh, j’espère que qu’on ne me dira plus jamais que 500 poules, c’est énorme!)

2/ Et en France, 3 foyers dans des basse-cour de particulier, 1 cas dans la faune sauvage en Moselle (Un cygne retrouvé mort à Metz avec du H7N7).

3/ Les flux de migrations descendantes des oiseaux en cours. (voir https://www.migraction.net/)

Est ce que la situation est la même sur tout le territoire ?

L’arrêté du 29 septembre 2021 a définit les zones à risque. Dans ces dernières, en risque « modéré », le confinement est déjà obligatoire depuis septembre. Il s’agit des départements suivants : Gers, Landes, Loires atlantique, Lot et Garonne, Maine et Loire, Pyrénées Atlantique, Hautes Pyrénées, Deux Sèvres, Vendée. Hors zone à risque, en modéré, on ne confine pas.

Quelles sont les conséquences de l’arrêté de novembre et du passage en risque élevé ?

Pour les éleveuses et éleveurs 

Tous, qu’ils soient en zone à risque ou non, doivent confiner volailles et palmipèdes.

Tous, même s’ils sont en bio, car la dérogation à la claustration des volailles auxquels ils/elles avaient droit a été supprimée. (Claustrer, c’est qu’on n’ouvre plus les trappes pour laisser accès au parcours).

Les élevages détenant des bâtiments de moins de 120m2 (c’est mon cas) peuvent sortir leur animaux sur un parcours réduit, on passe de 4 m2 / poule selon le cahier des charge bio ou plein air à 0,5 m2.

=> Si on a 250 poules, en bio en temps normal, on a 1000 m2 de parcours.

=> En réduit on a 125 m2.

Dans certains départements, les contrôles ont commencé.

Pour le consommateur / pour vous

Il n’est plus possible de trouver des œufs, du poulet, ou du canard, issus d’animaux qui sortent dehors chaque jour. Les animaux sont enfermés dans leur bâtiment. Mais, la grande distribution continue à vendre des œufs dit bio ou plein air, sans modifier leur étiquette, ni informer leurs clients. Puisque la grande distribution a détruit le lien entre le consommateur et celui qui le nourrit. C’est un mensonge à dénoncer largement.

Y a t il des solutions de repli ?

Pas vraiment, si celui ou celle qui fournit votre AMAP cesse son activité, sachez que les autres éleveurs sont soumis à la même réglementation, les particuliers doivent confiner leurs poules aussi, et la grande distribution vendra des œufs ou du poulet ou canard bio ou plein air sans vous dire que les animaux ne sortent plus.

Jusqu’à quand cela peut il durer ?

Dessin de Claire Robert, dessinatrice de presse

Deux facteurs peuvent nous permettre de repasser en situation tranquille :

– le statut indemne de la France (c’est à dire pas d’élevage contaminé sur le territoire, ni professionnel ni de particulier), de celui de ses pays voisins ;

– la période de migration des oiseaux. Les années précédentes, ça pouvait aller jusqu’à mai. D’où, le calcul de 9 mois de confinement potentiel sur 12 mois, de septembre à mai.

Pourquoi est ce que les éleveurs ne sont pas contents ?

  • Parce que les crises successives de grippe aviaire depuis 2017 se sont concentrées dans le Sud Ouest, et que les mesures devraient être adaptées selon les territoires et leurs risques spécifiques, voir ferme par ferme. Mais, nous manquons de vétérinaires d’élevage et les services de l’état, comme tout le service public, manque de moyens logistique et humain pour accompagner les éleveurs dans une démarche d’analyse ferme par ferme.
  • Parce qu’il y a des zones, comme à Mâlain, ou il n’y a pas quasi pas d’oiseaux migrateurs et que le risque que des oiseaux migrateurs contaminent des oiseaux locaux est infime.
  • Parce qu’au printemps, le ministre avait annoncé les futures mesures de confinement, mais avait dit qu’il tiendrait compte des différents modes d’élevage. Raté, la réduction du parcours est si drastique que c’est pour nous l’équivalent de la claustration.
  • Parce que les mesures relatives à la protection vis à vis de la faune sauvage nous étonnent. Selon l’ANSES, la contamination par les oiseaux migrateurs est à la marge, et c’est l’organisation de la filière canard gras du sud ouest qui a disséminé le virus. Sur 500 élevages contaminés au cours des 5 dernières années, 5 le sont de la faune sauvage, les 495 autres l’ont été d’élevage à élevage.

Que faudrait il faire ?

  • Davantage prendre en compte l’analyse de l’ANSES. A défaut, nous avons le sentiment que l’état à chercher à protéger l’élevage industriel de canard et l’export.
  • Réduire le transport des animaux (en nombre ET en distance),
  • Réduire la densité en élevage (nombre d’animaux au m2)
  • Réduire la densité des territoires (nombre d’élevages au km2), c’est à dire reconnaître les limites du modèle agricole productiviste qui pousse à faire de l’économie d’échelle qui inclut des effets secondaires dévastateurs (bien être animal, risque épidémiologique, traitements médicamenteux) avec des élevages toujours pour grands) et spécialiser les territoires (on élève du canard dans le sud ouest et ensuite on le transporte) pour favoriser le relocalisation alimentaire, bénéficiant de l’effet de dilution (plus il y a de diversité, moins il y a d’hôte pour que les méchants pathogènes s’y développent).
  • Changer de races d’animaux pour des animaux plus résistants (les basques ont une race de canard locale qui s’est montrée naturellement résistante à la grippe aviaire. Pourquoi cette piste là n’a t elle pas été explorée ?En bref, arrêter l’élevage industriel !

Quelles sont les pénalités en cas de non-respect des arrêtés ?

Dessin de Claire Robert, illustratrice de presse

Il peut y avoir des sanctions administratives comme l’obligation d’un vide sanitaire (tout tuer et ne pas remettre en place d’animaux), ou l’interdiction de vendre.

Comment s’organise le débat ?

Ils diront que c’est la faute du plein air ! Et que nous sommes des irresponsables à vouloir quand même sortir nos animaux.

Nous dirons que c’est la faute de l’élevage industriel, que cette crise montre les limites des politiques agricoles de ces dernières décennies, que le risque zéro n’existe pas.

Pour ma part, je nous crois capables de cultiver la vie vivante, d’en prendre soin d’une manière vraiment raisonnable mais je n’ai aucun goût à laisser gagner la culture de la vie mortifère.

Et si ma ferme était contaminée du fait du 0,01% de risque lié à la faune sauvage ?

Ce serait terrible. Ce virus est si pathogène, que j’aurai probablement en 48h, un charnier sur ma ferme. Peut être que 20% des poules y résisteraient, mais seraient abattues de toute façon, du fait d’avoir été ….. cas contact.

Mais, la différence, c’est que UN seul trajet du camion d’équarrisseur suffirait à emmener les cadavres car j’ai une toute petite ferme, et que comme je ne suis pas dans une filière œuf en intégration (Matines, Coquy, les Oeufs comtois, Loué, Bleu blanc cœur super U, etc…) ET qu’il n’y a aucun élevage de volailles ou palmipèdes avec des fournisseurs identiques à moins de 30 kms à la ronde, je ne contaminerai personne d’autre. Si tous les élevages étaient de petites tailles, vous n’auriez jamais entendu parlé de la grippe aviaire et des autres risques de zoonose.

 

Y a t il un risque de zoonose ?

Là, je laisse la parole à Vétérinaires sans frontières, en 20 minutes, tout comprendre de ce qu’est une zoonose, Osons causer : https://une-seule-sante.avsf.org/

 

Que peut on faire ?

Signer et diffuser largement les deux pétitions suivantes :

– https://s.42l.fr/elevage-plein-air

– et celle de vétérinaires sans frontières https://une-seule-sante.avsf.org/

Rejoindre la dynamique du MIRAMAP

Toutes les actions et documents sont sur leur site avec un kit de mobilisation

http://miramap.org/Mesures-sanitaires-absurdes-On-perd-la-Poule-Mobilisations-en-AMAP.html

Faire valoir votre exigence d’une qualité alimentaire pour vous même et pour tous, quelque soit les revenus des foyers, c’est le droit à l’alimentation. Cf : BD « Encore des patates », 2 euros en vente à la tourniquette. Commande groupée possible, livraison par Myriam.

Que fait la conf ?

Influenza: la Conf’ attaque la nouvelle réglementation au Conseil d’Etat

La Confédération paysanne vient de «déposer un recours devant le Conseil d’État» contre la nouvelle réglementation sanitaire liée à l’influenza aviaire, annonce le syndicat dans un communiqué le 16 novembre. Cette action en justice est menée de concert avec plusieurs autres syndicats et organisations (Modef, Fnab, Agir pour l’environnement, Sauve qui poule, Anafic, Miramap et Bio consom’acteurs). En vigueur depuis cet automne, les nouvelles règles imposent la claustration des volailles en cas de risque d’influenza, dorénavant sans dérogation possible notamment pour les petits élevages. Le recours porte sur l’arrêté du 17 septembre supprimant cette dérogation, a appris Agra Presse auprès des requérants. Leurs arguments? «La défense du bien-être animal, celle de la liberté d’entreprendre et l’insécurité juridique dans laquelle se retrouvent les éleveurs» du fait de l’application immédiate de la réglementation, sans période transitoire. Pour la Conf’, qui se mobilise actuellement dans huit départements, cette réglementation n’est pas adaptée aux élevages plein air: «Le ministère a fait le choix de sacrifier le plein air sur l’autel de la vocation exportatrice de la filière», dénonce-t-elle dans son communiqué.

 

Pour aller plus loin, partage de ressources, articles et vidéos sur le sujet

A voir absolument, vidéo de Vétérinaires sans frontières, didactique, informatique, excellente, 20′ avec une pétition à signer. https://une-seule-sante.avsf.org/

La grippe aviaire pour les enfants, c’est quoi ? https://www.youtube.com/watch?v=cX3lk3_cl3c

A lire

https://france3-regions.francetvinfo.fr/nouvelle-aquitaine/landes/grippe-aviaire-trop-de-canards-et-trop-de-derogations-pour-les-laisser-dehors-2171164.html

et

https://france3-regions.francetvinfo.fr/nouvelle-aquitaine/influenza-aviaire-il-faut-diminuer-densites-canards-preconise-anses-1917478.html

Pour comprendre le drame qui se joue dans le sud ouest, plonger au cœur de la problématique : émission FR3 du 5 janvier 2021 – 50 minutes. Table ronde avec un président de chambre d’agriculture, des éleveurs, syndicats agricoles FNSEA, CIFOG (filière canard gras), Modef, Conf ELB du pays basque, un vétérinaire. Des témoignages d’éleveurs : Une éleveuse témoigne du manque de moyens des services publics dans la gestion de la crise qui ont conduit à ce qu’elle reste avec son élevage contaminé, plus de 15 jours avec les cadavres en putréfaction sur sa ferme. + la réponse du ministre. Un autre témoigne que même le confinement de ses canetons n’a pas suffi à empêcher que son bâtiment ne soit contaminé, car il dit que le virus s’est installé dans la zone de la Chalosse au point qu’il est dans l’air !

On a découvert ce qui se passe quand l’hôpital public est détruit, voyez maintenant ce qui se passe côté agricole.

Pour aller plus loin, sur la thématique « Santé Globale » 

Conversation éthique, sciences et société : 7 mai 2021, Face aux crises pandémiques et écologiques, la santé globale comme enjeu scientifique, éthique et politique ; Intervention de Serge Morand, Didier Sicard, Claire Lajaunie, Frédéric Keck :

Si la santé peut être dite globale ici, c’est dans le sens d’un décloisonnement des préoccupations où santé humaine, santé animale et santé environnementale se pensent ensemble. . Il a été rappelé que 75 % des maladies infectieuses émergentes chez l’humain proviennent du monde animal, qu’il existe un lien entre pandémie et dégradation des écosystèmes, entre la hausse du nombre d’épidémies, la perte de biodiversité et l’augmentation du bétail (Serge Morand), et qu’il nous faut documenter et comprendre ces liens entre santé et biodiversité (Claire Lajaunie).

https://www.espace-ethique.org/ressources/captation-integrale/face-aux-crises-pandemiques-et-ecologiques-la-sante-globale-comme

dont l’intervention de Serge Morand, écologue de la santé :

https://youtu.be/jZOL3236Mo8?list=PLi-yyU8cpcgV1AEs7pJAnEf3Vlv1sc0Ih&t=1

Interview de deux médecins sur la grippe, + d’une heure, mais les 15 premières minutes servent à réviser nos bases : C’est quoi la différence entre un virus, une bactérie, un micro-organisme, c’est quoi la grippe ? Etc….

https://www.youtube.com/watch?v=k3mQQdclrnY

Dans la suite de Santé Globale,

Parce que 70% des antibiotiques consommés en France le sont par des animaux d’élevage (souvent en administration systématique),

Parce que l’OMS prévoit que la 2e cause de mortalité sera la résistance aux antibiotiques en 2050,

voici des articles complémentaires :

Le nouveau Sesame. automne 2021.

Nos bruits de fond. Drainages vertueux en Litunie, AgTech agricaine, réforme de l’évaluation de la PAC et les chroniques de Egizio Valceschini, Alain Fraval, Sergio. Dalla Bernardina…

Nos dossiers : Précarité et alimentation, Les antibiotiques, vautours genânt (?) et coproduits convoités…

https://revue-sesame-inrae.fr/18-2/

Les pistes de soin en lutte biologique

https://revue-sesame-inrae.fr/antibioresistance-et-sante-globale-quelle-ordonnance-demain/